III. De la nature principale des propositions de jugement de listes et de leurs candidats comme méthode d’élection d’une assemblée
Autant ajouter une mention entre les deux dans ce cas. Cf le sujet sur le nombre et les intitulés des mentions Terminologie MieuxVoter
Pour ma part, sémantiquement (aucun rapport avec le nombre de mentions ici, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit), avec les 7 mentions classiques du JM, j’estime que seul le « À Rejeter » pourrait avoir un sens de « je veux vous enlever des sièges », et le « Insuffisant » un statut de +0 voix pour siège, genre je trouve votre offre insuffisante pour que j’accepte d’utiliser ma voix pour que vous gagniez des MP, mais sans pour autant participer directement à vous enlever des sièges (à ne pas confondre avec le fait de voter pour qqn d’autre, ou à le juger mieux, par rapport à une abstention). Si c’est pas très clair, je définis « valeur absolue » et « valeur relative » juste après, mais attention ça représente des notions fondamentales dans ce domaine pour moi, mais ces appellations sont personnelles, rien ne dit que si vous entendez quelqu’un d’autre utiliser ces termes ce sera pour désigner la même chose.
Le sujet en question est là : Données brutes sur les expérimentations de méthodes alternatives de vote
Vous pourrez notamment voir un graphique pour l’exemple de 2007 dans le 9e message.
A noter qu’il y en a aussi eu un en 2012 (il n’apporte pas grand chose de plus que celui-ci, mais je l’ai aussi si besoin, et pour le coup le gagnant était moins clair que l’exemple de 2007).
Et cela c’est sans qu’une minorité de « à rejeter » puisse faire veto, et alors qu’un vote radical n’a pas plus de poids qu’un autre, ce qui ne serait pas le cas dans un système à points basé sur la moyenne.
Benoit a bien montré pourquoi ça changerait tout.
En fait, il y a une certaine méprise je pense. Il faut voir du point de vue de la transformation des suffrages en sièges, plutôt qu’en mention pure. Ce que @Benoit a dit, et je suis d’accord, ce n’est pas de forcer sur le rejet mais sur l’absence de soutien, ce qui n’est pas la même chose. Dans tous les systèmes que nous avons proposé (et cela inclut toute forme de vote transférable), chaque électeur a un total de voix qu’il répartit comme il veut et ne peut faire qu’élire des candidatures, le truc le plus bas (donner 0 voix) étant l’absence de soutien, et ne diminuant que la valeur relative d’une candidature (son %, ou son % à un moment donné dans le VUT), mais jamais sa valeur absolue (son nombre de voix brut). Que votre proposition consiste à sommer un certain nombre de mentions où une mention = un nombre fixe, ou que ce soit une médiane ou tout calcul de n’importe quelles mentions attribuées, tant qu’au moins la mention la plus basse est négative et non neutre (en termes d’effets, pas les intitulés des mentions, qui n’ont pas de valeur mathématique intrinsèque), alors elle correspond à du rejet, et non à une simple absence de soutien.
À mon sens, ce point est très important : dans le jugement majoritaire (« jugement » en raison des mentions plutôt que de points ; « majoritaire » en raison de la médiane plutôt qu’une moyenne/somme), d’un point de vue mathématico-technique, l’une des nécessités est que les mentions soient strictement, clairement, ordonnancées, sans aucune ambiguïté, tel que : a > b > c > d > e, etc. L’intérêt de proposer des mentions littérales plutôt que chiffrées est double : comme on utilise la médiane, il n’y a pas de question d’écart entre chaque mention, chaque mention est un autre « niveau » de jugement, alors que dans un système où l’on somme (tel que le vote de valeurs, ou vote par notes) on utilise des points car il s’agit de points qui s’additionnent, ce qui n’est pas le cas du JM.
Une mention littérale est donc préférable (mais il faut bien comprendre que techniquement elle signifie « la mention la plus basse », « la mention la plus haute », ou « la mention à tel ou tel niveau »), et celle-ci peut correspondre à un jugement clair sur l’offre/candidature/proposition, pour une raison bien simple et très importante : le JM a été conçu historiquement pour la présidentielle, et ce n’est pas pour rien :
- la présidentielle est une élection avec un seul gagnant, un seul PR pour une durée définie, un seul pour l’ensemble des électeurs (c’est donc pareil si on veut élire un maire, un gouverneur, un ministre, etc), donc il est logique que chaque électeur puisse s’exprimer sur tous les candidats en lice, puisque dans tous les cas ce sera son PR (alors que dans une assemblée il y a beaucoup de MP pour représenter assez fidèlement l’électorat, vous pourriez donc juste élire certains, et d’autres représentent d’autres électeurs ; d’ailleurs ça ne marche pas pour les circonscriptions avec trop peu de MP)
- de ce fait (1 seul gagnant) découle le fait que le nombre total d’issues est très faible : 1 issue par candidat (voire +1 pour si on veut proposer une possibilité qu’aucun d’eux ne soit élu), à moins de proposer de remplacer la présidentielle par un conseil/gouvernement/cohabitation/triumvirat. Ce qui fait que le jugement d’un électeur peut être la réponse à une question telle que : « En prenant en compte tous les éléments, je juge en conscience que pour exercer la fonction de président de la République, les candidats suivants seraient… ».
Pour une assemblée, ce n’est pas du tout le cas : il y a beaucoup plus de candidats, et infiniment plus d’issues possibles, avec énormément de combinaisons proches les unes des autres. C’est pourquoi le problème de votre proposition, et de celle à l’origine de ce sujet, est que les mentions mises par un électeur ne répondent pas vraiment à une question.
Et on ne peut pas décemment leur proposer l’ensemble des combinaisons possibles (ni même de les classer d’ailleurs) : ça serait un nombre astronomique totalement impossible à juger chacun, ça aboutirait inévitablement à des égalités, à nécessiter un nombre astronomique lui aussi de mentions, le résultat serait très aléatoire, et même s’il correspondait à la préférence d’une majorité, l’assemblée qui en ressortirerait n’aurait aucune garantie d’être représentative et de respecter le principe d’égalité des voix.
Et c’est pourquoi cette affirmation n’est pas nécessairement vraie, même pour un électeur rationnel. Vous oubliez sur ce point qu’un électeur ne cherche pas nécessairement à obtenir une assemblée composée monolithement d’une seule liste, même pour un même sujet il peut vouloir une certaine nuance, par exemple en recherchant un certain équilibre qui sera favorable au débat parlementaire et à la fabrique de la loi.
Bref reprenons votre type de propositions @GrothenDitQue :
- Combien de « assez bien » valent 1 « excellent » ?
- L’écart entre « bien » et « passable » est-il supérieur, inférieur ou égal, et dans quelles proportions, à celui entre « passable » et « à rejeter », ou entre « assez bien » et « très bien » ?
- Combien de sièges vaut « bien », ou combien de « bien » vaut combien de sièges ?
Vous voyez que l’une comme l’autre de ces questions (que vous preniez la moyenne ou apparenté, ou la médiane ou apparenté) n’ont pas de sens, tout du moins pas de réponses intrinsèques, et c’est précisément pour cela que les propositions, dans votre discussion, comme à l’origine de ce sujet, changent si facilement et ne sont absolument pas intuitives, précisément car elles ne le sont pas, si l’électeur n’a pas eu sous les yeux marquer comment les mentions sont transformées en points ou en proportion de l’assemblée, il ne peut pas les deviner.
Or dans le jugement majoritaire (ou dans un préférendum, c’est-à-dire un référendum qui voit s’affronter plusieurs propositions alternatives qui sont incompatibles), on peut y répondre très facilement : chaque voix vaut autant, 1 « assez bien » tendra à rapprocher la mention majoritaire d’un candidat vers « assez bien », donc fera autant monter un candidat avec une mention majoritaire inférieure à « assez bien », que celui qui l’a jugé « excellent ». Cependant au-delà d’ « assez bien », ces 2 électeurs divergent : celui qui l’a jugé « excellent » la fait toujours monter d’autant, tandis que celui qui l’a jugé « assez bien » la fait redescendre vers « assez bien ». Quant à l’écart entre des mentions, pour chaque candidature à juger, c’est la proportion d’électeurs ayant mis des mentions entre les deux mentions. Comme il n’y a qu’un vainqueur, la troisième question ne se pose pas.
Je vous propose donc une autre définition de l’arbitraire : les mécanismes qui sont injustifiés, qui ne sont pas déductibles que par la description des effets attendus du mode de scrutin. Et le pouvoir arbitraire (« discrétionnaire » semble pas assez fort d’après cette déf) étant ce qui décidé sans justification ni critère légal/administratif par tout acteur autre que l’électeur pour son vote (puisque lui est démocratiquement souverain, et tire sa légitimité de sa citoyenneté selon la théorie du droit social choisie, mais bref je m’égare).