Jugement majoritaire et scrutin de liste

Le Vote Unique Transférable, retour sur l’article de Nicolaus Tideman et ses exemples concrets

Je vous remercie pour ce document. Je vais reprendre ici certains certains exemples extraits du PDF :

Cet exemple est le genre d’exemples qui a poussé à modifier le quota. Il me semble que le quota le plus moderne qui a été proposé est [suffrages exprimés / nb MPs + 1] mais en assumant qu’il soit nécessaire de strictement dépasser le quota pour être élu, sur le même modèle que proposé par Irwin Mann :

Bref ici, cela donne pour 80 électeurs, un quota de 80/(7+1) = 10. R, S et T sont élus au 1er tour avec 10 de leurs 11 voix. D, E, F, G et U restent dans la course.
Au 2e tour, on reporte 1/11e des voix des électeurs de R, S et T, tous sur U, ce qui additionné aux 8 voix de U, lui permet de dépasser le quota de 10 et d’être élu. D, E, F et G (les 4 démocrates) restent dans la course. On constate que les 4 républicains sont élus et que le parti est donc d’ores et déjà assuré d’être majoritaire.
Au 3e tour, il ne reste plus qu’1/41e des voix des électeurs républicains. Si on assume que les électeurs sont obligés de classer l’ensemble des candidats, cela permet à D, E et F, à qui il ne manquait qu’une fraction de voix, d’être élus. Si on imagine que les 41 électeurs républicains ont pu avoir le choix de ne pas classer les candidats démocrates, alors G est irrémédiablement éliminé et ces voix sont intégralement reportées sur D, puis le report suivant fait élire E, puis le report suivant fait élire F.

On note aussi qu’ici il n’y a que 8 candidats pour 7 sièges, ce qui est quand même un ratio proche de 1, les électeurs de toute façon vont devoir élire 7 de ces 8 candidats. On pourrait s’attendre démocratiquement à davantage de candidats, même si on imagine que cette situation est due au faible nombre d’électeurs, au nombre important d’électeurs par siège, et potentiellement à la situation (peu d’enjeux aux scrutins, ou peu d’envies d’être élu, etc).

Tous ces exemples se font sur un très petit nombre d’électeurs (au point qu’ici on se trouve avec une triple égalité avec 4 voix sur 12 pour élire 2 sièges… à cette échelle ça peut arriver à n’importe quel mode de scrutin) et de sièges, ce qui augmente proportionnellement l’importance numérique accordée aux +1 et aux « arrondi supérieur » qui existent ou non dans la formule suite au suffrages exprimés, au nombre de sièges, car sur des élections avec des milliers ou des millions d’électeurs, avec des dizaines de dizaines ou des centaines de sièges, nul doute que cela serait beaucoup moins important que par exemple la proportion de votes non-transférés (qui, cependant, devrait diminuer si l’offre électorale qui reste en couse est plus élevé).
De plus, j’ajoute qu’une élection sur 2 sièges est l’un des cas les plus compliqués selon moi (ce qu’on a vu avec @Eban sur ce fil), si on assume un VUT et donc une élection parlementaire, 2 possibilités :

  • soit il s’agit d’une circonscription et donc on a coupé l’élection en multiples circonscriptions, ce que j’ai toujours déconseillé, et auquel cas un SPPLF sans transférabilité n’aurait pas donné de meilleur résultat et aurait même davantage poussé au vote utile, le seuil naturel étant de 33,33 % ou d’un peu plus de 25 %, en fait c’est pire, le binôme avec le plus de voix aurait eu 1 des 2 élus, et le 2nd élu serait revenu soit au binôme avec le 2e plus grand nombre de voix soit au binôme avec le plus de voix lui aussi selon son score mais aussi selon celui du 2e plus grand nombre de voix.
    D’ailleurs cela se constate aux élections parlementaires chiliennes, dont les circonscriptions étaient jusqu’en 2017 constituées de 2 sièges dans une variante un peu complexe de SPPLF (attention, les élections départementales françaises sont uninominales de facto, les deux candidats d’un binôme sont traités comme un seul candidat pouvant gagner les 2 sièges, en aucun cas comme 2 candidats à l’intérieur d’une même liste ordonnée avec ou sans coche, rature ou panachage)
  • soit il s’agit d’une assemblée de type législative, qui ne comporte que 2 MPs. Dans ce cas quel est le débat législatif ? Quelle est la majorité pour voter des lois ? L’1 des 2 MPs ou les 2 MPs ?
    D’ailleurs avec 3 personnes, si on s’attend comme je le proposais pour le quota, à définir la majorité par être strictement supérieur à N/2, soit ici >1,5 donc 2, on rappelle que la formule législative officielle « la moitié des voix +1 » signifie N/2 +1 soit 1,5+1=2,5 ce qui signifie 3=majorité :heavy_check_mark: mais 2<« majorité » de 3 :x:, un détail qui a déjà causé une crise institutionnelle au Guyana.

On se rapproche donc beaucoup du scrutin uninominal à 1 tour, ce qui est logique, puisqu’on est proche du cas de SPPLF avec 1 seul siège à remplir, cas de l’eurodéputé de la communauté germanophone de Belgique.

Ce cas est bien connu, c’est un gros défaut du vote préférentiel alternative vote IRV comme le montre https://www.youtube.com/watch?v=ZoGH7d51bvc&t=535s, il y a d’ailleurs aussi https://www.youtube.com/watch?v=ZoGH7d51bvc&t=390s. Encore une fois, transformer un mode de scrutin d’assemblée en mode de scrutin pour choisir 1 seul vainqueur aboutit à de telles conclusions. Le scrutin plurinominal proportionnel de liste fermé sur 1 seul siège EST du scrutin uninominal à 1 tour, où le candidat élu l’est au plus fort reste (sauf s’il avait déjà >50%). Mais je suis d’accord, qu’un vainqueur de Condorcet peut ne pas être élu en vote unique transférable. Mais ce n’est pas forcément un problème : on ne demande pas quel candidat ou quelle liste serait préférée par une majorité contre une autre liste (c’est cependant une forme relativement similaire à l’une des façons de faire du jugement sur des élections d’assemblée, sur lequel on a parlé plus haut sur ce fil). Si on trouve les 577 candidats qui battraient tous les autres en duel électoral, devraient-ils devenir les nouveaux députés ? En gros ce serait un peu comme les deux tours avec les circonscriptions, en méthode de Condorcet. Les minorités, même pesant une part très conséquente de l’électorat, mais minoritaire, pourraient se retrouver avec aucun représentant à l’AN, et @Benoit et moi étions d’abord pour conclure que ça n’allait pas.

D’un point de vue technique, ce point est je vous l’accorde, sans doute le plus difficile à gérer pour les dépouilleurs. Surtout car pour moi qu’une technique par fraction de voix de chaque électeur, telle que proposée par les règles plus récentes, est nécessaire, laisser les dépouilleurs compter des 2nd choix aléatoirement et en ignorer fatalement d’autres est injuste, casse un avantage certain du VUT, crée une opacité sur le vote et donne un pouvoir arbitraire aux dépouilleurs. Bien que le VUT ait été élaboré par des mathématiciens, ils n’avaient pas les calculatrices ou les tableurs qui peuvent calculer automatiquement les résultats (ce qui n’implique aucunement du vote électronique).

Avec mon mode de scrutin par listes, au début du dépouillement ce ne devrait pas être trop compliqué, mettre le paquet selon leur 1er choix devrait suffire. Ensuite il faudrait peut-être ranger les paquets de voix selon leur combinaison 1er choix+2e choix, et pour la fin peut-être indiquer avec un marqueur sur un bulletin il représente encore combien de fractions de voix. Dépouillement à expérimenter.

Par ailleurs, cela n’empêcherait pas le dépouillement de continuer à se faire bureau de vote par bureau de vote. Cependant avant d’entamer le prochain tour de dépouillement, il faudrait que l’ensemble des bureaux de vote aient terminé leur tour de dépouillement précédent, ce qui voudrait dire devoir systématiquement attendre le bureau de vote le plus lent (sauf si les écarts sont déjà suffisants pour que les bureaux de vote les plus lents ne pourront de toute façon pas changer qui est élu ou éliminé à l’issue du même tour de dépouillement).

Oui, c’est évident et je ne le nie pas. J’ai donné quelques arguments de comment cet effet pourrait être diminué et en bonne partie évité, à divers endroits de ce message. Et le paradoxe d’Arrow porte sur l’ensemble des scrutins par classement (uninominaux inclus), en plus pour l’élection d’une assemblée il n’y a pas qu’un seul vainqueur.

Dans ce scrutin, R puis S sont rapidement et largement élus. Mais pour le 3e siège on observe un coude-à-coude très serré entre T, U et V, toutefois très loin du quota qui est de 20 (et je ne vois pas de mode de scrutin où ce ne serait pas le cas). Cette partie de l’article porte sur comment selon quelle fraction de la voix des premiers électeurs de R et de ceux de S est utilisée pour élire S, cela aboutit à l’élection de T, U, ou V.
On exclut évidemment de choisir arbitrairement que ce soient telles ou telles des 58 voix (25+15+9+9) qui soient entièrement utilisées. Dans tous les cas, chacun des 40 (25+15) premiers électeurs de R a utilisé la moitié de sa voix pour élire R, il leur reste donc 0,5 voix chacun à l’issue du premier tour.

La question est donc :

  • Est-il préférable que l’utilisation des voix se fasse proportionnellement au nombre de voix restant à chaque électeur ? (auquel cas ici les 40 R>S utiliseraient 20/38 de leur 0,5 voix restante, soit 0,263 et il leur reste 0,237, et les 18 S>R utiliseraient 0,474
  • Est-il préférable que l’utilisation des voix se fasse au prorata du nombre d’électeurs, de bulletins de vote, donc de voix initiales ? (auquel cas ici chacun utiliserait 20/58 voix soit 0,345 voix, ce qui laisserait 0,155 voix à chacun des 40 R>S et 0,655 voix à chacun des 18 S>R)

Philosophiquement je pencherais pour la première option et non la seconde, mais vous qu’en pensez-vous ?

En fait les propositions qui ont faites historiquement semblent un peu plus complexes que cela :

J’ai eu assez de mal à comprendre cette méthode. Pour le coup, je ne comprends pas exactement en quoi elle serait plus facile pour le dépouillement.

Mais juste un point sur l’indécision et la manipulabilité du truc : je doute qu’il y ait des contestations, on a déjà des modes de scrutin avec des cas où ce n’est pas clair et où un autre détail de la formule (par ex les diverses formules de plus forte moyenne et de plus fort reste) aurait changé l’un des élus en SPPLF.

J’ai refait le calcul dans un tableur et la première option me donne U sorti au 3e tour, faute de recevoir des transferts en provenance des électeurs de R et de S, dont il reste une proportion minoritaire mais toujours très importante vu le nombre d’électeurs et le coude-à-coude de T et U qui sont premier et second choix des mêmes électeurs. Les électeurs de U, qui classent tous V comme le pire candidat (comme 57,5% des électeurs d’ailleurs) se reportent tous sur T qui avait déjà de toute façon presque atteint le quota. Une élection de T ne me semble pas si problématique finalement : après tout, ça reste le 2e choix des électeurs de U et de V, et le 3e choix de nombreux électeurs.
Les méthodes proposées dans l’article, à savoir celle de Brian Meek, et celle de C.H.E.Warren, font élire respectivement T et U, systématiquement après l’élimination de l’autre candidat parmi eux, avec donc chaque fois V comme candidat final non-élu, ce qui me semble être le bon résultat au vu des votes de l’ensemble des électeurs, du nombre de sièges et de R et S déjà élus.
Il faudrait d’ailleurs qu’il reste la quasi-totalité de leurs demi-voix aux 25 R>S>V>U>T pour que V soit élu (en utilisant 0% de leurs voix pour élire S, ce qui est évidemment inacceptable, et même impossible pour élire S, ce qui est ici un prérequis pour arbitrer le truel TUV), V n’aurait que 21,5 voix au 3e tour, soit à peine 1,5 de plus que le quota, donc je ne vois pas comment il pourrait être le 3e/3 élu avec ces votes. D’ailleurs ce truel final est encore un cas de l’éternel topos du vainqueur de condorcet éliminé à l’avant-dernier tour. Sauf que là où d’autres modes de scrutin feraient élire sans vergogne le perdant de condorcet (ici V), dans tous les cas les voix seront reportées de T vers U ou de U vers T, et ces électeurs seront donc bien représentés.

Merci encore pour cet article fort intéressant, et qui reprend aussi l’historique du VUT, maintenant j’imagine qu’il ne me reste plus qu’à me (re)plonger dans la lecture de Counting single transferable votes - Wikipedia.
J’ajoute concernant l’historique du VUT, qu’il avait été adopté par un certain nombre de villes aux USA tout au long de la moitié du XXe siècle, et qu’il a dans un certain nombre d’entre elles été abandonné, non pas parce qu’il ne fonctionnait pas bien, mais précisément parce qu’il fonctionnait trop bien : sous le VUT, des candidats communistes et des candidats afro-américains avaient été élus, et évidemment vu le contexte cela a déplu à certains qui pouvaient changer le mode de scrutin et sont donc revenus au classique first-past-the-post.
Et concernant les Irlandais, ils ont refusé par référendum par deux fois, un changement de mode de scrutin qui aurait remplacé le vote unique transférable (certes, d’une proportionnalité relative, à cause de la petite taille des circonscriptions) vers le first-past-the-post (Third Amendment of the Constitution Bill 1958 - Wikipedia et 1968 Irish constitutional referendums - Wikipedia), même si cet exemple n’est peut-être pas un argument si solide que ça pour juger des préférences de la population, et évidemment pas concernant la représentation démocratique à l’asssemblée.

Mais un point intéressant qu’on remarque ici est que si on constate que l’ordre entre 2 candidats pour une poignée d’électeurs peut bouleverser la donne, c’est précisément car le VUT permet d’indiquer son 2e choix, 3e choix, etc. Avec un scrutin uninominal (que ce soit SU1T ou vote unique non-transférable) ou un SPPLF, vous ne pouvez pas savoir ce que les électeurs pensent de tous les candidats/listes autres que le/la seule pour laquelle il a voté (excellent exemple concis là-dessus : https://www.youtube.com/watch?v=vfTJ4vmIsO4), et d’ailleurs qu’est-ce qu’on aurait ici ?

  • en vote unique non transférable : 50 % des électeurs mettent R comme 1er choix, il est donc assurément élu. Mais il l’aurait aussi été avec 33 % des voix, voire moins, alors le mode de scrutin pénalise ces électeurs parce qu’il est un candidat trop populaire. Avec 22,5 % S est aussi élu. Mais le 3e élu est V, par 2 voix d’avance sur U, malgré son impopularité parmi les 13 électeurs non-représentés, et les 33 sur 58 autres électeurs. Ici, en particulier s’il y a 2 sièges à élire, pour contrer une potentielle alliance T-U-V, il faudrait qu’une majorité des électeurs de R votent R, mais aussi qu’une autre partie vote S pour contrer une potentielle alliance T-U-V.
    En effet, ce mode de scrutin pousse à une importante discipline de vote, mais une discipline de vote bien plus difficile que le simple vote utile en SU1T qu’on connaît : pour maximiser ses gains, il faut découper votre électorat en le bon nombre de candidatures, avec trop peu de candidats, il y a gaspillage de voix, et avec trop de candidats, il y a dispersion des voix.
    Et bien sûr cela est d’autant plus difficile que le nombre de candidats augmente, puisque vous ne savez pas comment se répartiront les voix des électeurs de vos groupes de concurrents. Mais comme on ne sait pas ce que préfèrerait chaque électeur du groupe, il faut carrément imposer précisément à untel de voter ceci et à tel autre de voter ceci, ce qui semble difficilement faisable pour de simples sympathisants.
    L’un des avantages de la transférabilité est de rendre obsolète une telle discipline, puisque voter votre ordre de préférence personnelle ne vous pénalisera pas, en tout cas pas plus que la discipline de vote.

  • en scrutin plurinominal proportionnel de liste fermée : en imaginant que R, S, T, U et V ont chacun formé leur liste de 3 candidats, R obtient le 1er siège avec un large surplus, S est le mieux placé pour décrocher le 2e siège, avec 22,5 % sur 25 % ou sur 33,3 %. V (et encore plus T et U, qui semblent se diviser un même électorat) semble encore loin, et je pense que dans la plupart des formules R obtiendrait le second siège.

Ces 2 cas, ainsi que celui dont j’ai parlé à la suite de l’exemple de mon dernier mode de scrutin avec les résultats des dernières législatives, est exactement du même type que :arrow_down:, qui existe en raison de la non-transférabilité :

  • petit bonus : dans le mode de scrutin des sénateurs français dans les départements avec 1 ou 2 sièges, ou encore à une partie des élections de délégué d’élèves : chaque électeur peut ou doit voter pour 2 candidats, au 1er tour si 1 ou 2 candidats dépasse les 50% il est élu, sinon il peut se maintenir au 2nd tour qui est un SU1T/SSPLF/VUNT classique. Ici il y a 2 interprétations possibles : R, S, T, U et V choisissent et réussissent à poser 2 candidatures chacun, et les 80 électeurs votent pour chacune de ces 2 candidatures préférées. Les 2 R sont piles à 50 %, en modifiant légèrement les résultats ou en assumant qu’il obtient la majorité pour être élu au 1er tour, R remporterait 2 sièges, sinon il y aurait un 2nd tour dans lequel ils pourraient aussi le faire. S’ils ne sont pas élus au 1er tour, le 3e siège devrait se jouer entre l’un des 2 S contre un T (ou U) qui bénéficierait des retraits ou des reports de voix des électeurs de U (ou T) et de V, ce qui ferait élire T (ou U) avec 22 voix contre les 18 voix de S (sauf si une partie des électeurs de R vote tactique pour empêcher l’élection de T ou U, au risque qu’il n’y ait qu’un R au lieu de 2). Mais si les 2 R sont élus au 1er tour (et ils n’en sont pas loin), alors les 40 électeurs de R vont, conformément à ce mode de scrutin, avoir autant de poids pour désigner le dernier élu que n’importe quel autre électeur ! Ils vont donc vraisemblablement massivement sauver S qui va être élu par 58 voix contre 28, et T (ou U) n’a aucune chance.
    Alors il est vrai que 2 candidatures chacun ne respecte pas l’esprit de l’exemple au VUT, mais avec 1 seule candidature pour R, S, T, U et V, ce serait exactement pareil. Soit R est élu au 1er tour, et alors S écrase T ou U, soit R ne l’est pas et alors ses électeurs devraient hésiter entre voter leur vraie préférence et risquer que S soit battu par T ou U qu’ils aiment moins, soit voter tactiquement pour sauver S mais au risque que ce soit leur premier choix R qui soit carrément battu, ce qui serait évidemment impensable au VUT.
    Il est aussi vrai que ce mode de scrutin ne s’applique qu’aux départements avec 1 ou 2 sénateurs et qu’il n’y a aussi que 2 délégués à élire par classe. Dans ce cas, même si on ne sait pas combien d’électeurs auraient utilisés leurs 2 voix, il y a 2 cas possibles : soit R et S dépassent les 50% et c’est plié (ce qui arrivera si on est obligé de voter pour 2 candidats), soit R (ou S) dépasse les 50% mais pas S (ou R), dans ce cas S (ou R) écrasera T et/ou U et/ou V au 2nd tour. Il semble très improbable qu’aucun électeur sur 49 (SR ou RS) ne le fasse, mais dans ce cas on retomberait sur du SU2T, dans lequel le 2nd tour se jouerait sur les règles de maintien au 2nd tour : si c’est seulement les 3 premiers, c’est R S V et alors V n’a aucune chance, mais si c’est au choix, alors U (ou T) et V peuvent se retirer au profit de T (ou U) et on se retrouve dans le même cas de dilemme pour les électeurs de R : soit voter leur préférence R au risque assez probable de voir T (ou U) prendre le 2nd siège, soit voter tactique pour sauver S au risque moins probable que leur candidat préféré R soit battu.

Finalement, dans ces circonstances, le vote unique transférable est-il vraiment davantage un casse-tête pour les électeurs ? Le dépouillement serait plus long et fastidieux, oui, ça ne fait aucun doute, mais en termes de manipulabilité et d’incitation aux votes utile et tactique, c’est bien moins pire que ce qu’on fait aujourd’hui. Et l’aspect « listes » que je propose gomme encore davantage cette manipulabilité (qui existe surtout parce qu’on arrive au célèbre cas du vote préférentiel/alternatif où il reste 3 candidats et qu’on élimine le plus rassembleur des 3, ce qui est donc directement lié à la quantité d’offre en présence.

De plus, comme j’utilise aussi la transférabilité pour permettre des listes incomplètes, à chaque fois où ce cas arrivera, en plus de signer le succès d’une liste qui aura donc atteint son propre objectif électoral de façon on ne peut plus claire, le retransfert massif de voix vers des seconds choix constituera autant de tours de dépouillement supplémentaires où aucune liste ne sera éliminée, diminuant encore l’occurrence de ce risque de paradoxe. Imaginons que dans notre exemple néerlandais, le NSC n’ait présenté que 16 candidats, qui auraient tous été élus dès le 1er tour, il aurait ainsi généré l’équivalent de 3,442 fois le quota, qu’auraient pu se répartir les autres listes selon les 2nd choix des électeurs du NSC, et qui auraient donc probablement fait élire des MPs au 2e tour, évitant de devoir éliminer VVD, CDA et DeBasis. Bon d’accord, pas très crédible, mais on notera qu’aux dernières législatives irlandaises, le Sinn Féin n’a présenté dans certaines circonscriptions qu’un seul candidat, là où il a gagné davantage de voix qu’1 siège, ce qui a permis l’élections de petits partis qui étaient les 2nd choix des électeurs du Sinn Féin).